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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/598

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POLYBE, LIV. V.

Les troupes de mer escaladèrent donc le port avec vigueur, et Ardye le faubourg. Comme le péril était égal de toutes parts, et que les assiégés ne purent venir au secours d’aucun endroit, le faubourg fut bientôt emporté. Ceux qu’Antiochus avait mis dans ses intérêts courent aussitôt à Léontius, qui commandait dans la ville, et le pressent d’envoyer un parlementaire au roi, et de faire la paix avec lui avant qu’il prenne la ville d’assaut. Léontius, qui ne savait pas que ceux-ci eussent été corrompus, épouvanté de la frayeur où il les voyait, envoya au roi pour tirer de lui des assurances qu’il ne serait fait de mal à aucun de ceux qui étaient dans la ville. Le roi promit pleine sûreté aux personnes libres, et il y en avait environ six mille. Quand il fut entré dans la ville, non-seulement il ne fit aucun mal aux hommes libres, mais il rappela tous les exilés, permit à la ville de se gouverner selon ses lois, et rendit à chacun ses biens. Il mit aussi garnison dans le port et dans la citadelle.




CHAPITRE XIV.


Conquêtes d’Antiochus dans la Cœlo-Syrie. — Expédient dont se servent deux ministres de Ptolémée pour arrêter ses progrès. — Trève entre les deux rois.


Pendant que le roi mettait ordre à tout dans Séleucie, vinrent des lettres de la part de Théodote, qui le pressait de venir dans la Cœlo-Syrie. Le roi ne savait quel parti prendre sur ces nouvelles. Nous avons déjà vu que ce Théodote était Étolien de nation, et qu’après avoir rendu des services à Ptolémée, non-seulement on ne lui avait témoigné aucune reconnaissance, mais que sa vie même avait été en danger. Au temps qu’Antiochus faisait la guerre contre Molon, ce Théodote, ne voyant plus rien à espérer de Ptolémée, et se défiant de la cour, après avoir pris Ptolémaïde par lui-même, et Tyr par Panétole, engagea Antiochus à faire la conquête de la Cœlo-Syrie. Antiochus remit donc à un autre temps la vengeance qu’il voulait tirer d’Achéus, et, abandonnant tout autre dessein, reprit avec son armée la route qu’il avait quittée. Il traversa la plaine de Marsyes, et campa près des défilés de Gerre, sur le lac qui est entre les défilés et la ville. Ayant appris que Nicolas, un des généraux de Ptolémée, assiégeait Théodote à Ptolémaïde, il laissa les soldats pesamment armés, donna ordre aux officiers d’assiéger Broque, château situé sur l’entrée du lac, et, suivi des troupes légères, il alla pour faire lever le siége de Ptolémaïde. Nicolas n’attendit pas que le roi fût arrivé : il se retira et envoya Lagoras et Dorymène, l’un Crétois et l’autre Étolien, pour s’emparer des défilés de Béryte. Le roi les en chassa et mit son camp. Là, vint le rejoindre le reste de ses troupes, avec lesquelles, après les avoir exhortées à le seconder avec courage dans ses desseins, il se mit en marche, et entra hardiment dans la belle carrière qui semblait s’ouvrir devant lui. Théodote, Panétole et leurs amis vinrent au devant de lui. Il les reçut avec toutes sortes de bontés, et entra dans Tyr et dans Ptolémaïde. Il y prit tout ce qu’il y avait de munitions, entre autres quarante vaisseaux, dont vingt étaient pontés et bien équipés de tout : ils avaient au moins chacun quatre rangs de rames ; les autres étaient à trois, à deux et à un seul rang. Tous ces vaisseaux furent donnés à l’amiral Diognète.

Antiochus, ayant appris là que Ptolémée s’était retiré à Memphis, et que toutes ses troupes étaient réunies à Pé-