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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/643

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POLYBE, LIV. VI.

la légion, fait approcher de lui ceux qui se sont signalés par quelque action courageuse, donne d’abord de grandes louanges à cet exploit particulier, en y joignant tout ce qui s’est passé de mémorable dans leur vie, et ensuite il distribue de grandes récompenses. Il fait présent d’une lance à celui qui a blessé l’ennemi ; à celui qui l’a tué et dépouillé, si c’est un fantassin, on lui donne une coupe ; si c’est un cavalier, il reçoit un harnais, quoique autrefois on ne donnât qu’une lance. Ceci, pourtant, ne doit pas s’entendre d’un soldat qui aurait tué ou dépouillé un ennemi dans une bataille rangée ou dans l’attaque d’une place, mais de celui qui, dans une escarmouche ou en quelque occasion où il n’y a aucune nécessité de combattre en particulier, court de plein gré, et par pure valeur, insulter l’ennemi.

Dans la prise d’une ville, ceux qui, les premiers, montent sur la muraille, reçoivent une couronne d’or. Il y a aussi des récompenses pour ceux qui défendent ou sauvent des citoyens ou des alliés. Ce sont ceux qui ont été délivrés qui couronnent eux-mêmes leur libérateur ; s’ils refusent de le faire, le tribun les y contraint. Ils doivent, outre cela, pendant toute leur vie, le même respect pour lui que pour leur père, et il faut qu’ils lui rendent tous les devoirs qu’ils rendraient à ceux qui leur ont donné la vie.

Ce n’est pas seulement à ceux qui sont en campagne et qui servent actuellement, que ces récompenses inspirent du courage et de l’émulation, c’est encore à ceux qui sont restés chez eux ; car, sans parler de la gloire qui accompagne à l’armée ces présens, et de la réputation qu’ils donnent dans la patrie, ceux qui les ont reçus ont droit, au retour de la campagne, de se présenter, dans les jeux et dans les fêtes, vêtus d’un habit qu’il n’est permis de porter qu’à ceux dont les consuls ont honoré la valeur. Ils suspendent encore aux endroits les plus apparens de leur maison les dépouilles qu’ils ont remportées sur les ennemis, pour être des monumens et des témoignages de leur courage. Tel est le soin et l’équité avec lesquels on dispense les peines et les honneurs militaires : doit-on être surpris, après cela, que les guerres que les Romains entreprennent aient un heureux succès ?

La solde du fantassin est de deux oboles par jour. Les capitaines ont le double, la cavalerie une drachme. La ration de pain, pour l’infanterie, est de la moitié, au plus, d’un médimne attique de blé ; celle du cavalier, de sept médimnes d’orge par mois et deux de blé. L’infanterie des alliés reçoit la même ration que celle des Romains ; leur cavalerie, un médimne et un tiers de blé, et sept d’orge. Cette distribution se fait, aux alliés, gratuitement ; mais, à l’égard des Romains, on leur retient sur la solde une certaine somme marquée pour les vivres, les habits ou les armes qu’on doit leur donner.

Pour lever le camp, voici la manière dont ils s’y prennent : le premier signal donné, on détend les tentes et on plie bagage, en commençant néanmoins par celles du consul et des tribuns ; car il n’est pas permis de dresser et de détendre des tentes avant que celles-ci aient été dressées ou détendues. Au second signal, on met les bagages sur les bêtes de charge, et au troisième signal, les premiers marchent et tout le camp s’ébranle.

L’avant-garde est, le plus souvent, composée des extraordinaires ; après eux, l’aile droite des alliés, qui est suivie du bagage des uns et des autres.