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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/677

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POLYBE, LIV. VIII.

dieux, il priait et pressait avec instance Cambyle d’achever ce qu’il avait commencé.

Bolis agissait avec le même empressement auprès de Nicomaque et de Mélancome, qui, ne doutant pas qu’il n’agît avec bonne foi, donnèrent à Arien, sans hésiter, des lettres écrites en certains caractères, dont ils étaient convenus de se servir, et l’envoyèrent à Achéus. Ces lettres l’exhortaient à s’en fier entièrement à Bolis et à Cambyle, mais elles étaient écrites de manière que, quand elles eussent été interceptées, on n’aurait pu déchiffrer rien de ce que qu’elles contenaient.

Arien, ayant été introduit par Cambyle dans la citadelle, remit les lettres à Achéus ; et comme dès le commencement il avait été initié à tous les projets, il lui rendait exactement compte du plan que l’on avait conçu. Interrogé sur différentes particularités qui regardaient, ou Sosibe, ou Bolis, ou Nicomaque, ou Mélancome, ou Cambyle, il répondait juste à toutes les questions ; et il répondait avec autant d’aplomb et de fermeté que s’il se fût agi de lui-même, parce que la conjuration que tramaient entre eux Cambyle et Bolis lui était inconnue. Ces réponses d’Arien jointes aux lettres de Nicomaque et de Mélancome, ne permirent pas à Achéus de révoquer en doute ce qu’assurait Arien. Il le renvoya avec des lettres pour ceux qui lui avaient écrit.

Après plusieurs voyages semblables, enfin Achéus ne trouva rien de mieux à faire que de s’en fier entièrement à Nicomaque, d’autant plus qu’il ne lui restait aucune autre espérance de sortir du péril où il était. Il manda qu’il était prêt à se mettre entre les mains de Bolis et d’Arien, et qu’on n’avait qu’à les envoyer. Son dessein était d’abord de se tirer du danger qui le menaçait, et ensuite de prendre la route de la Syrie ; car, il se persuadait que, paraissant tout d’un coup chez les Syriens après une délivrance si extraordinaire, et pendant qu’Antiochus était encore devant Sardes, sa présence ne manquerait pas de causer parmi eux de grands mouvemens, et de faire beaucoup de plaisir aux peuples d’Antioche, de la Cœlo-Syrie et de Phénicie. L’esprit rempli de ces grands projets, il attendait Bolis avec impatience. Mélancome, ayant reçu ces lettres, fait de nouvelles instances auprès de Bolis, se flatte de nouvelles espérances et l’envoie. Celui-ci avait fait auparavant partir Arien, pour avertir Cambyle de la nuit qu’il avait choisie pour aller le joindre au lieu marqué : ils passèrent ensemble un jour entier à délibérer sur les mesures qu’ils avaient à prendre, et la nuit suivante, ils entrèrent dans le camp. Le résultat de la délibération fut que, si Achéus sortait de la citadelle, ou seul, on accompagné d’un second avec Bolis et Arien, il serait aisé de s’en saisir ; mais que la chose ne serait pas facile si sa suite était plus nombreuse, surtout avec le dessein qu’ils avaient de l’amener vivant à Antiochus, pour faire de plus plaisir à ce prince ; et par cette raison, il fallait qu’Arien, en amenant Achéus dans la citadelle, marchât devant lui, comme, connaissant mieux qu’un autre ce chemin qu’il avait fait souvent, et que Bolis marchât derrière, afin que quand on serait arrivé à l’endroit où, par les soins de Cambyle, tous ceux qui étaient d’intelligence dans cette affaire se trouveraient prêts, il s’emparât de la personne d’Achéus, de peur ou que, pendant le tumulte et dans l’obscurité, il ne parvînt à s’enfuir dans des lieux couverts, ou que dans le désespoir il ne se précipitât du haut de quelque rocher, et ne fît ainsi