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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/746

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POLYBE, LIV. XI.

citoyen le zèle et la passion qu’il a de travailler avec gloire à son propre salut et à celui de sa patrie.

Il n’y avait personne de ses auditeur qui n’applaudît à ce discours et n’en admirât la sagesse, de sorte que l’on n’était pas plus tôt sorti du conseil que l’on montrait au doigt ceux que l’on voyait mis avec trop de recherche, et qu’on en chassait quelques-uns de la place publique. Mais c’était surtout dans les expéditions et quand on se mettait en campagne que l’on s’étudiait à observer ces judicieuses maximes : tant une exhortation, faite à propos par un homme respectable, a de force, non-seulement pour détourner les hommes du mal, mais encore pour les porter au bien, surtout quand sa vie répond à ses paroles, car alors il est presque impossible de ne point se rendre à ses conseils ! C’était là le caractère de Philopœmen, simple dans ses habits, frugal dans ses repas, nul soin de ce qui regardait son corps, dans les conversations parlant peu et de manière à ne pouvoir être repris. Pendant tout le cours de sa vie, il s’appliqua par dessus toutes choses au culte de la vérité. Aussi ses moindres paroles étaient toujours écoutées avec respect, et on n’hésitait point à y ajouter foi. Il n’avait pas besoin de beaucoup de paroles pour persuader, sa conduite étant un modèle de tout ce que l’on devait faire. Peu de mots joints à l’autorité qu’il s’était acquise et à la solidité de ses conseils, suffisaient pour réfuter les longs discours que faisaient souvent ceux qui lui étaient opposés dans le gouvernement, quelque vraisemblables qu’ils fussent.

L’assemblée congédiée, tous retournèrent dans leurs villes, pleins d’admiration pour tout ce qu’ils avaient entendu dire à Philopœmen, et persuadés que, tant qu’il serait à la tête des affaires, il n’arriverait aucun malheur à la république. Il partit aussitôt lui-même pour visiter les villes et mettre ordre à tout. Il assembla le peuple, lui marqua ce qu’il était à propos qu’il fit, et leva des troupes. Après avoir passé près de huit mois aux préparatifs de la guerre, il assembla une armée à Mantinée, pour y défendre contre Machanidas la liberté de tout le Péloponnèse.

Ce tyran de Sparte, plein de confiance en ses forces, ne fut pas plus ému de ce soulèvement des Achéens, que s’il l’eût souhaité. Dès qu’il eut appris qu’ils étaient à Mantinée, il prononça à Tégée aux Lacédémoniens un discours tel que la conjoncture présente le réclamait, et le lendemain, à la pointe du jour, il se mit à la tête de l’aile droite de la phalange : les mercenaires de l’un et de l’autre côté étaient rangés sur la même ligne, venaient ensuite des chariots chargés de catapultes et de traits. En même temps Philopœmen fit sortir de la ville son armée partagée en trois corps. Les Illyriens, les cuirassiers, les étrangers et les troupes légères sortirent par la porte qui conduit au temple de Neptune ; la phalange par une autre qui regarde l’occident, et la cavalerie de la ville par une troisième qui en est proche. Les troupes légères s’emparèrent d’une colline assez grande qui est devant la ville, et qui commande le chemin appelé Xenis et le temple de Neptune. Il leur joignit les cuirassiers du côté du midi, et auprès d’eux les Illyriens. À côté de ces troupes, la phalange rangée, ses sections en échiquier avec les intervalles, fut placée sur le même front le long du ravin qui va au temple de Neptune à travers la plaine de Mantinée, et qui joint les montagnes qui la séparent du pays des Élisphaliens. L’aile droite était com-