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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/843

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POLYBE, LIV. XVII.

intéressés, pour défendre leurs droits devant le sénat et y porter leurs plaintes contre le roi de Macédoine.

Flaminius, ayant tiré des conférences tout l’avantage qu’il avait projeté d’abord d’en tirer, travailla sur-le-champ à faire en sorte que les suites en fussent également heureuses. Il eut grand soin de prendre toutes ses sûretés ; il n’accorda rien à Philippe dont il pût profiter. Il voulut que, pendant les deux mois de trève qu’il lui donnait, il envoyât son ambassade à Rome, et il lui ordonna de retirer incessamment ses garnisons de la Phocide et de la Locride. Ses soins s’étendirent aussi sur ses alliés. Il eut une extrême attention qu’il ne leur fût fait aucun tort par les Macédoniens pendant le temps de la trève. Après avoir indiqué par écrit à Philippe les conditions de la trève, il exécuta par lui-même ce qui lui restait à faire. Il fit partir pour Rome Amynandre, prince qu’il connaissait d’un esprit flexible et d’un caractère à vouloir aisément tout ce que ses amis de Rome voudraient, quelque chose qu’on lui demandât ; il comptait d’ailleurs que son nom de roi ajouterait beaucoup de poids à l’ambassade et ferait une grande impression sur le sénat. Il députa ensuite Quintus Fabius, son neveu, et Quintus Fulvius, et avec eux Appius Claudius, surnommé Néron. De la part des Étoliens partirent pour Rome Alexandre l’Isien, Damocryte de Calydoine, Dicéarque Thrichonien, Polémarque d’Arsinoé, Lamius d’Ambracie, et Nicomaque l’Acarnanien. Ceux qui s’étaient enfuis de Thurium et qui s’étaient réfugiés dans Ambracie députèrent Théodote de Phérée, qui avait été banni de la Thessalie, sa patrie, et qui demeurait à Strate. L’ambassadeur des Achéens fut Xénophon d’Égée ; celui d’Attalus, Alexandre tout seul, et celui des Athéniens, Céphisodore.

Toutes ces ambassades arrivèrent à Rome avant que le sénat se fut déterminé sur le choix des magistrats de l’année. On y délibérait encore si l’on en ferait partir un contre le roi de Macédoine. Comme les amis de Flaminius étaient persuadés que les deux consuls ne sortiraient pas d’Italie, à cause de la crainte où l’on était des Gaulois, ils entrèrent tous dans le sénat avec les ambassadeurs, et y déclamèrent amèrement contre Philippe. On répéta là beaucoup de choses qui lui avaient auparavant été dites à lui-même ; mais ce que l’on tâcha d’imprimer profondément dans l’esprit des sénateurs, c’est que jamais il n’y aurait de liberté chez les Grecs, tant que Philippe aurait Chalcis, Corinthe et Démétriade sous sa domination : ce roi disant lui-même, ce qui était très-vrai, que ces trois places étaient les entraves de la Grèce ; que tant qu’il aurait garnison dans Corinthe, le Péloponnèse serait toujours dans l’oppression ; que si on le laissais dans Chalcis et dans le reste de l’Eubée, les Locriens, les Béotiens et les Phocéens n’auraient rien à espérer ; qu’enfin c’en était fait aussi de la liberté des Thessaliens et des Magnètes, si l’on souffrait que Philippe et ses Macédoniens restassent dans Démétriade ; que quand ce roi offrait de sortir des autres endroits, ce n’était que dans le dessein d’éluder pour le présent leurs poursuites ; que maître des pays dont on avait parlé, il remettrait les Grecs sous le joug le plus aisément du monde et le jour qu’il lui plairait ; qu’il ne leur restait donc plus qu’à prier le sénat, ou de réduire Philippe à sortir des places qu’on lui avait marquées, ou de laisser les choses dans l’état où elles étaient, et de continuer la guerre

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