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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/874

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POLYBE, LIV. XXI.

cette place, et que Publius Scipion venait d’y arriver, députèrent Échedème au camp des assiégeans, avec ordre de saluer de leur part les deux Scipions, Lucius et Publius, et de les engager, si cela se pouvait, à ne plus faire la guerre aux Étoliens. Publius, prévoyant que cet ambassadeur lui serait utile dans la suite, le reçut avec beaucoup de politesse et de bonté. Son dessein était de conduire les affaires des Étoliens à un accommodement, ou, s’ils refusaient d’y entrer, de ne point s’arrêter là et de passer en Asie ; car il sentait bien que pour terminer cette guerre et venir glorieusement à bout de cette expédition, le seul moyen était, non de subjuguer les Étoliens, mais de vaincre Antiochus et de se rendre maître de l’Asie. Il écouta donc volontiers ce que lui dit l’ambassadeur sur la paix, et il lui ordonna d’aller sonder les Étoliens sur le même sujet. Échedème part, arrive à Hypate et confère avec les magistrats d’Étolie. On l’entend avec plaisir parler de paix, et l’on nomme des ambassadeurs avec lesquels il revient trouver Publius, qui était campé à huit stades d’Amphise. Après un long détail qu’ils lui firent des services que les Romains avaient tirés des Étoliens, Publius, à son tour, leur parlant avec beaucoup de douceur et d’amitié, raconta ce qu’il avait fait en Espagne et en Afrique, et de quelle manière il s’était conduit à l’égard de ceux qui l’avaient fait maître de leur sort, et enfin il leur déclara qu’il fallait qu’ils se soumissent aussi et qu’ils s’abandonnassent aux Romains. D’abord ces ambassadeurs espéraient que la paix allait se conclure ; mais, quand ils se furent informés des conditions, et qu’on leur eut dit qu’ils n’obtiendraient la paix qu’en se remettant sans restriction à tout ce qu’il plairait aux Romains, ou qu’en payant sans délai mille talens, et qu’en aimant ou haïssant ceux que Rome aimait où haïssait ; ils furent indignés d’entendre un langage si peu conforme au premier qu’on leur avait tenu. Ils dirent cependant qu’ils communiqueraient ces ordres aux Étoliens, et prirent congé. Échedème reparle aux magistrats étoliens ; on remet l’affaire en délibération. Comme la première des conditions était impraticable, et que la somme immense que l’on demandait était au-delà de leur pouvoir, et que la seconde les effrayait, parce qu’après s’y être autrefois soumis ils avaient pensé être jetés dans les fers, inquiets et embarrassés sur le parti qu’ils avaient à prendre, ils renvoyèrent les ambassadeurs pour prier ou qu’on diminuât la somme, afin qu’on pût l’acquitter, ou que les magistrats et les femmes ne fussent pas comptés parmi ceux que les Romains avaient en leur disposition. Avec ces instructions ils reviennent à Publius ; mais Lucius leur dit qu’il n’avait pouvoir de traiter de paix avec eux qu’aux conditions qu’il leur avait marquées. Ils retournent à Hypate ; Échedème les accompagne ; nouvelle délibération. Il leur conseille, puisque la paix ne pouvait actuellement se faire, de demander une trève pour respirer un peu de l’accablement où ils étaient, et d’envoyer des ambassadeurs au sénat, ajoutant que peut-être il serait plus indulgent à leur égard, ou s’il les ménageait aussi peu, qu’ils épieraient l’occasion que le temps leur présenterait de se délivrer des maux qu’ils souffraient ; que leur état ne pouvait devenir pire qu’il était, mais que, pour bien des raisons, il avait lieu d’espérer qu’il deviendrait meilleur. On trouva cet avis très-judicieux, et l’on députa encore à Lucius pour en obtenir six mois de trève,