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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/944

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POLYBE, LIV. XXVIII.

aux ordres du sénat, étaient très-inutiles. Il loua fort les Acarnaniens de leur bonne volonté, et partit pour Larisse, où il devait joindre le proconsul. (Ambassades.) Dom Thuillier.


Persée envoie une ambassade à Gentius.


Les ambassadeurs que Persée envoya au roi Gentius, furent Pleurate, qui était exilé, et qu’il avait recueilli, et Adée de Béroé. Ils avaient ordre de faire connaître au roi d’Illyrie ce que celui de Macédoine avait fait depuis qu’il était en guerre avec les Romains, les Dardaniens, les Épirotes et les Illyriens, et de l’engager à faire alliance avec lui et avec les Macédoniens. Ces ambassadeurs traversent le désert d’Illyrie, canton que les Macédoniens avaient ravagé pour fermer aux Dardaniens toute entrée dans l’Illyrie, franchissent le mont de Scorde, et après une route si difficile et si fatigante, ils arrivent enfin à la ville de ce nom. Là, ayant appris que Gentius était à Lisse, ils lui donnent avis qu’ils vont le trouver. Le prince envoie au-devant d’eux, ils le joignent, et lui font part des ordres dont ils étaient chargés. Gentius ne parut pas opposé à l’alliance qu’on lui proposait ; mais pour ne pas accorder d’abord ce qu’on lui demandait, il prétexta qu’il n’avait ni préparatifs de guerre ni argent, et qu’il n’était point, par conséquent, en état d’entrer en guerre contre les Romains. Après cette réponse, les ambassadeurs reviennent à Persée, qui était alors à Stubère, où il avait vendu son butin, et où il faisait reposer ses troupes. Après avoir entendu là ce que Gentius avait répondu, il dépêcha une seconde fois à ce prince Adée, Glaucias un de ses gardes, et un Illyrien, et les chargea des mêmes ordres, faisant semblant de n’avoir pas assez compris de quoi Gentius manquait, et à quoi il tenait qu’il ne prît le parti des Macédoniens. Il décampa ensuite et prit la route d’Ancyre. (Ibid.)


Nouvelle ambassade de la part de Persée vers Gentius, aussi inutile que les deux premières.


Les derniers ambassadeurs revinrent au roi de Macédoine sans avoir rien fait de plus que les premiers, et sans apporter d’autre réponse. Gentius s’en tint à celle qu’il avait déjà donnée. Il voulait bien se joindre à Persée, mais il dit que sans argent il ne pouvait le faire. C’était justement ce que Persée ne comprenait pas ou ne voulait pas comprendre. Aussi, en envoyant Hippias pour traiter des conditions de l’alliance, ne dit-il pas un mot de l’argent que Gentius demandait, ce qui aurait été le seul moyen de se rendre ce roi favorable. Je ne sais, en vérité, comment qualifier ce qui précipite les hommes dans des fautes si grossières. Est-ce absence d’esprit ? est-ce une fatalité qui les entraîne à leur perte ? Pour moi, je penche à croire qu’il ne faut pas chercher ailleurs que dans cette fatalité la raison pourquoi l’on voit des hommes qui, pleins d’une noble ardeur pour les grands exploits et disposés à les entreprendre, même au risque de leur vie, négligent ou refusent d’employer le principal moyen d’y réussir, quoique ce moyen leur soit connu et qu’ils soient en pouvoir de le mettre en œuvre. Si Persée eût voulu donner, je ne dis pas des sommes considérables, comme il le pouvait, mais une médiocre quantité d’argent aux villes, aux rois, aux chefs de républiques, pour fournir aux frais de la guerre, tous les Grecs et tous les rois, au moins la plupart, se seraient déclarés en sa faveur. C’est une