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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/989

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POLYBE, LIV. XXXII.

Députation des Achéens à Rome au sujet de Polybe et de Stratius.


Il était aussi venu des ambassadeurs de la part des Achéens pour demander le retour de ceux de cette nation qui avaient été accusés, et surtout de Polybe et de Stratius ; car la plupart des autres, et presque tous les principaux d’entre eux, étaient morts pendant leur exil. Ces ambassadeurs étaient Xénon et Téléclès. Ils n’étaient chargés que de demander cette grâce en supplians, de peur qu’en prenant la défense des exilés ils ne parussent tant soit peu opposés aux volontés du sénat. On leur donna audience. Dans leur harangue, il ne leur échappa rien qui ne fût très-mesuré. Malgré cela, les Pères demeurèrent inflexibles, et prononcèrent qu’ils s’en tenaient à ce qui avait été réglé. (Ibid.)


Famille des Scipions.


La vertu de Paul-Émile, vainqueur de Persée, éclata surtout après sa mort. Tel on croyait être son désintéressement pendant qu’il vivait, tel on trouva qu’il était quand il eut expiré, et c’est principalement à cette marque que la vertu se reconnaît. Ce Romain, qui avait porté d’Espagne dans les coffres de la république plus d’argent qu’aucun autre de son temps, qui s’était rendu maître des trésors immenses de la Macédoine, et qui pouvait en disposer comme il lui aurait plu ; ce Romain, dis-je, pensa si peu à s’enrichir lui-même, comme nous l’avons déjà dit, qu’après sa mort on ne trouva pas dans sa maison de quoi faire à sa femme la dot qu’elle avait apportée en mariage, et qu’il fallut vendre des terres pour achever la somme. On loue, on admire ce détachement des richesses dans quelques-uns de nos Grecs ; mais on doit convenir que celui de Paul-Émile en efface entièrement la gloire : car, si ne pas recevoir de l’argent, et le laisser à celui qui le présente, comme Aristide et Épaminondas l’ont fait, est une chose digne d’admiration, combien est-il plus admirable, quand on a tout un royaume en sa puissance, et qu’on est libre d’en user à son gré, de ne rien souhaiter de ce qu’on y trouve ! En cas que le fait que je viens de rapporter paraisse incroyable, je prie le lecteur d’observer ici, et partout où je dirai des Romains quelque chose d’extraordinaire, que je sais, à n’en pouvoir douter, que les Romains, attirés par la curiosité de voir les plus illustres événemens de leur histoire, ne manqueront pas de lire mon ouvrage ; qu’ils sont parfaitement instruits des faits que je raconte et qui les regardent, et que je n’aurais ni pardon ni grâce à attendre d’eux, si j’avais l’imprudence de débiter des choses fausses sur leur compte. Or personne ne s’expose volontiers au péril de n’être pas cru et d’être méprisé.

Mais puisque la suite des faits nous a conduits au temps où nous devons parler de cette illustre famille, il faut que je m’acquitte de la promesse que j’ai faite dans mon premier livre, de dire dans l’occasion pourquoi et comment Scipion s’était fait à Rome une réputation au-dessus de son âge, et comment sa liaison avec moi s’était accrue à un point, que non-seulement la renommée s’en était répandue dans l’Italie et dans la Grèce, mais encore chez les nations les plus éloignées.

J’ai déjà dit que notre commerce avait commencé par les entretiens que nous avions ensemble sur les livres qu’il me prêtait. Cette union avait déjà fait quelque progrès, lorsque, au temps où les Grecs évoqués à Rome devaient être dis-