Page:Lissagaray - Histoire de la Commune de 1871, MS.djvu/99

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des villes rangé en bataille contre ce Paris, l’athée, le révolutionnaire qui avait fait trois Républiques et bousculé tant de Dieux. Dès la première séance leur fiel creva. Au fond de la salle, un vieillard, seul sur son banc, se lève et demande la parole. Sous son grand manteau brille une chemise rouge. C’est Garibaldi. À l’appel de son nom il a voulu répondre, dire d’un mot qu’il résigne le mandat dont Paris l’a honoré. Les hurlements couvrent sa voix. Il reste debout, élève cette main desséchée qui a pris un drapeau aux Prussiens, les injures redoublent. Le châtiment tombe des tribunes. « Majorité rurale ! honte de la France ! » jette une voix sonore, Gaston Crémieux de Marseille. Les députés se retournent, menacent. Les bravos et les défis des tribunes tombent encore. Au sortir de la séance, la foule applaudit Garibaldi. La garde nationale lui présente les armes malgré M. Thiers qui apostrophe l’officier commandant. Le peuple revint le lendemain, forma une haie devant le théâtre, obligea les députés réactionnaires à subir ses acclamations républicaines. Mais ils savaient leur force et à l’ouverture de la séance ils attaquèrent. Un rural montrant les représentants de Paris : « Ils sont couverts du sang de la guerre civile ! » Un des élus de Paris crie : « Vive la République ! » les ruraux ripostent : « Vous n’êtes qu’une fraction du pays. » Le jour suivant, le théâtre fut entouré de troupes qui refoulèrent au loin les manifestants.

En même temps, les journaux conservateurs unissaient leurs sifflements contre Paris, niaient jusqu’à ses souffrances. La garde nationale avait fui devant les Prussiens ; ses seuls faits d’armes étaient le 31 octobre et le 22 janvier ; elle seule était responsable de la défaite ayant ruiné par la sédition les magnifiques plans de Trochu et Ducrot. Ces calomnies fructifiaient dans une province dès longtemps préparée. Telle était son ignorance des événements du siège qu’elle avait nommé, et quelques-uns plusieurs fois, Trochu, Ducrot, Jules Ferry, Pelletan, Garnier-Pagès, Emmanuel Arago à qui Paris n’avait pas fait l’aumône du vote.

C’était aux représentants de Paris de dire le siège, les responsabilités, la signification du vote parisien, de dresser contre la coalition clérico-monarchiste le dra-