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Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/201

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journal, « ont endossé l’habit militaire et seront désormais les fils du 29me de ligne »… qui avait assassiné leur père !

Les soldats, ainsi encouragés, s’ébattaient à leur aise. Les officiers s’étaient emparés des rues, insolents, l’œil provocateur, faisant résonner leurs sabres. Ils encombraient les trottoirs des cafés et les restaurants, bruyants, rieurs, grossiers, entourés de filles[1]. Dans un hôtel de la rue Paul Lelong, quatre officiers de ligne requirent des femmes publiques, et firent un tel vacarme pendant plusieurs jours, que, malgré la terreur qu’ils inspiraient, les habitants du quartier demandèrent leur éloignement.

Paris vécut ainsi pendant plus de dix jours dans la fusillade, et les gens de l’ordre s’en délectèrent. Tel fut du moins le témoignage de leurs journaux.

« Une épouse inconsolable fait des reproches à son époux.

» — Tu n’es pas gentil !… Comment, tu vas voir fusiller et tu ne m’emmènes pas !

» — Qu’est-ce que vous voulez voir ? dit la mère à ses filles : les ruines ou les cadavres ?

  1. Il fallut un ordre du jour spécial pour interdire aux officiers de paraître en uniforme avec des filles publiques.