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Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/229

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à travers les trous à air. Le silence se fit.... et les cercueils roulants repartirent à toute vapeur. A Brest et à Cherbourg, les prisonniers furent répartis sur de vieux vaisseaux embossés en rade, chacun de ces bâtiments contenant environ mille prisonniers. Depuis la cale jusqu’au pont, dit un témoin oculaire[1], ils sont — (ils sont encore après quatre mois !) — empilés dans des parcs formés par des madriers comme dans de grandes caisses d’emballage. Les sabords cloués ne laissent passer qu’un filet de lumière. Nulle ventilation. L’infection est horrible. La vermine y grouille. Il y a des blessés : pas de médicaments, pas d’ambulances ; rien.

« Les malheureux, inconnus, — car on n’a pas la liste de leurs noms, on ne s’est pas occupé de leur identité[2],— restent là, entassés dans leurs cages, gardés par des canons chargés à mitraille, enfermés entre d’énormes grilles de fer, plus misérables que les nègres à bord d’un navire faisant la traite. »

  1. Muller. Droits de l’Homme, — Montpellier.
  2. A Oléron, M. Muller ayant demandé des renseignements au commandant du port, celui-ci répondit : « Il n’y a pas de capitaine rapporteur, il n’y a pas de listes, et quant à moi, depuis que j’ai gagné un pou en allant les inspecter, je ne m’en occupe plus. »