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Page:Lissagaray - Les huit journees de mai, Petit Journal Bruxelles, 1871.djvu/94

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chargés de poudre, retentissaient sous les voûtes avec un cliquetis sinistre. Jamais les fêtes du baron Haussmann n’éveillèrent d’aussi sonores échos. Dans cette dernière nuit de son existence, l’Hôtel de ville offrit un aspect prodigieusement fantastique. La vie et la mort, le râle et le rire se coudoyaient, dans les escaliers, à chaque pièce, à chaque étage, baignés par la même lumière éblouissante du gaz. Souvent on surprenait des espions et on les exécutait sur la place de l’Hôtel de ville contre une barricade. Malheur à tout individu suspect ou soupçonné de l’être. Dans ces moments de luttes physiques et morales, quand la vie est à la merci d’une erreur ou d’un caprice, l’insouciance de la mort vous gagne comme un vertige, et l’existence perd tout son prix, comme l’or entre les mains fiévreuses du joueur.

On ne savait rien à l’Hôtel de ville de l’exécution du rédacteur du Siècle, Gustave Chaudey, fusillé à la prison de Sainte-Pélagie. Le Siècle seul a rapporté cet épisode, et l’on n’a pu contrôler son témoignage. Il raconte que le soir, à onze heures, le procureur de la Commune Raoul Rigault, pénétrant dans la cellule de Gustave Chaudey, lui déclara qu’il allait être immédiatement exécuté. Conduit dans la partie