Aller au contenu

Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/186

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
180
Du Gouvernement Civil,

en mettant diverses parties de ce pouvoir en différentes mains. Ils n’avoient jamais senti l’oppression de la domination tyrannique ; et les mœurs de leur tems, leurs possessions, leur manière de vivre, qui fournissoient peu de matière à l’avarice ou à l’ambition, ne leur faisoient point appréhender cette domination, et ne les obligoient point de se précautionner contre elle. Ainsi, il n’est pas étonnant qu’ils aient établi cette forme de gouvernement, qui, comme j’ai dit, non-seulement s’offroit d’abord à l’esprit, mais étoit la plus conforme à leur condition et à leur état présent. Car ils avoient bien plus besoin de défense contre les invasions et les attentats du dehors, que d’un grand nombre de loix, de gouverneurs et d’officiers, pour régler le dedans et punir les criminels, à cause qu’ils n’avoient alors que peu de biens propres, et qu’il y en avoit peu d’entre eux qui fissent tort aux autres. Comme ils s’étoient joints en société volontairement et d’un commun accord, on ne peut que supposer qu’ils avoient de la bienveillance et de l’affection les uns pour les autres, et qu’il y avoit entre eux une mutuelle confiance. Ils craignoient bien plus ceux qui n’étoient pas de leur corps, qu’ils