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Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/265

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par M. Locke.

laisse pourtant pas d’être vrai que les règnes des bons Princes ont été toujours très-dangereux et très-nuisibles aux libertés de leur peuple, parce que leurs successeurs n’ayant pas les mêmes sentimens qu’eux, ni les mêmes vues et les mêmes vertus, ont voulu tirer à conséquence et imiter les actions de ceux qui les avoient précédés, et se servir de la prérogative de ces bons Princes, pour autoriser tout ce qu’il leur plaisoit faire de mal ; comme si la prérogative accordée et permise seulement pour le bien du peuple, étoit devenue pour eux un droit de faire, selon leur plaisir, des choses nuisibles et désavantageuses à la société et à l’état. Aussi, cela a-t-il donné occasion à des murmures et à des mécontentemens, et a causé quelquefois des désordres publics, parce que le peuple vouloit recouvrer son droit originaire, et faire arrêter et déclarer que jamais ses Princes n’avoient eu une prérogative semblable à celle que ceux qui n’avoient pas à cœur les intérêts et le bien de la nation, qu’ils s’attribuoient avec tant de hauteur. En effet, il est impossible que personne, dans une société, ait jamais eu le droit de causer du préjudice au peuple, et de le rendre mal-