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Page:Londres - L’Âme qui vibre, 1908.djvu/93

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AVANT-PROPOS À L’ANCIENNE MODE

Ami, toi qui le soir, assez distraitement,
Prendras ce livre en main pour passer un moment ;
Toi, qui feuilletteras ces pages d’un doigt calme,
Sans penser que chacune est un soupir de l’âme,
Ô toi ! lecteur ami, si tu pouvais savoir
Tout ce que m’a coûté ce que tu lis ce soir !
Si tu pouvais comprendre, au moins une seconde,
Le labeur de celui qui rêve pour le monde !
Si tu savais le prix d’un vers, même mauvais !
Si tu sentais le poids, et si tu te doutais
Des nuits d’énervement, d’attente et de folie
Qu’un poète subit pour écrire sa vie !
Si tu t’imaginais l’effondrement moral
Qu’il éprouve en songeant qu’il fait peut-être mal !
Si tu pouvais le voir, dans ses heures divines,
Plein d’angoisse et d’amour, lutter avec les rimes !
Si tu pouvais sentir la chaleur de son front
Quand dans un vers, enfin, son rêve entier se fond !