Aller au contenu

Page:Longin - Voyage a la Guadeloupe, 1848.djvu/240

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 228 —

D’après tous les faits que j’ai rapportés sur l’esclavage, peut-on s’étonner que les malheureux qui en sont les victimes, nourrissent toujours des projets de vengeance ? Ce qui m’étonne, moi, c’est qu’infiniment plus nombreux que les blancs, ils ne les aient pas déjà réalisés ; et j’avoue ingénument que la crainte d’en être témoin a souvent troublé mon sommeil pendant les six années que j’ai passées dans la colonie, et que pendant les trois mois d’hivernage surtout, où toute retraite est impossible, faute de bâtiments, j’étais dans des transes presque continuelles.

Quelques précautions qu’on prenne, nécessairement ils secoueront le joug tôt ou tard. L’esclavage est un désordre qui ne peut subsister encore bien longtemps. On ne prescrit point contre les droits de la nature. Déjà fermente le germe d’où doit sortir la liberté des noirs. Ne vous faites point illusion, trop fiers créoles, vos esclaves n’attendent qu’un moment favorable pour venger sur vous les horreurs de leur servitude ! Qu’il vous serait facile pourtant de les satisfaire et de dissiper l’orage qui plane sur vos têtes ! Que demandent-ils ? la liberté. Que vous en coûterait-il pour la leur rendre ? Il vous faudrait faire, sans doute, un sacrifice ; mais, dût-il vous en coûter la moitié