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Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/199

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Ruben.

Le vice-roi nous accorde là une grande faveur.

Nephtali.

On reconnaît à cette bonté la noblesse et la tendresse de son âme.

Benjamin.

Allons, Bato, viens avec nous.

Bato.

Je crains fort la fin de tout ceci. — Toutes les majestés me font peur ; et à te dire la vérité, j’aime mieux un petit ragoût à l’ail et au fromage dans ma cabane, que tous les phénix d’Arabie que l’on mange dans les palais des rois.

Benjamin.

Tu as un goût bien vulgaire.

Bato.

Mais pas si sot : car je n’ai jamais ouï dire que l’on ait empoisonné aucun grand personnage dans un ragoût à l’ail.

Ils sortent.
Joseph.

Écoutez, capitaine.

Putiphar.

Monseigneur !

Joseph.

Dès qu’ils auront mangé, vous les ferez repartir.

Putiphar.

Qu’avez-vous donc éprouvé ?

Joseph.

De la pitié et de l’affection. Je me suis attendri en voyant des gens de mon pays… Puis, Benjamin n’est-il pas bien beau ?

Putiphar.

Il serait digne d’être roi.

Joseph.

Écoutez-moi.

Putiphar.

Qu’ordonnez-vous, monseigneur ?… je ne vous comprends pas… La pitié et l’affection paraissent vous causer bien du trouble.

Joseph.

Dans leurs sacs, avec le blé, mettez à tous leur argent, sans qu’ils le soupçonnent, car je veux me montrer ami aux gens de ma patrie… et dans le sac du plus jeune vous mettrez ma coupe la plus précieuse.

Putiphar.

Que voulez-vous de plus, monseigneur ? Car sans doute cela doit avoir un but.

Joseph.

Je vous dirai en secret comment il faudra les poursuivre après leur départ, et les arrêter comme des larrons.

Putiphar.

Je ferai à leur insu ce que vous ordonnez.