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Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/21

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et une âme, et que je diffère essentiellement des femmes par la barbe et par le courage. Voilà pour moi. Quant aux femmes, il en est aussi de plusieurs espèces. Il y a d’abord la femme en général. Puis la femme se divise en demoiselles et en dames. Il y a des demoiselles qu’on appelle ainsi parce qu’elles ne sont pas mariées. Il y a de véritables demoiselles. Il y a même d’autres demoiselles. De même il y a des dames de plusieurs espèces ; et c’est pour cela que je vous demande à quelle espèce appartient votre maîtresse.

Célia.

Elle est une dame belle, spirituelle, et pardessus le marché, remplie d’honneur.

Tristan.

Et que cherche-t-elle par ici ?

Célia.

Des nouvelles d’un sien frère qu’elle a perdu.

Tristan.

Vous ne songez donc pas que vous vous exposez ?

Célia.

Nullement.

Tristan.

Si fait.

Célia.

À quel péril ? Est-ce que nous ne sommes pas en sûreté sur la terre ?

Tristan.

Oui, vous le croyez ; mais la mer peut franchir d’un moment à l’autre les limites que la nature et l’art lui ont imposées, s’élancer vers vous deux en rugissant, et vous emporter comme des merluches fugitives.

Célia.

Vilain drôle !

Tristan.

Moi, vilain ?

Célia.

Taisez-vous ! Il vous sied bien de faire l’Espagnol avec moi !

Phénice

Je vous proteste, mon bien, que je me rends.

Lucindo.

Cette assurance m’enivre de joie et d’orgueil.

Phénice.

Quel est votre nom ?

Lucindo.

Lucindo.

Phénice.

Il me plaît infiniment[1].

  1. Mot à mot : « Il n’est pas extraordinaire que vous m’enflammiez, puisque vous avez un nom formé de lumière. » Parce que Lucindo vient de lux, lumière, flambeau.