Page:Lope de Vega - Théâtre traduction Damas-Hinard tome 2.djvu/304

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Citron.

Et qu’elle se joue de vous.

Don Juan.

En ce cas, je l’aurai échappé belle. — Je lui renverrai son argent.

Citron.

Un étranger avoir une pareille aventure !

Don Juan.

Tu n’as peut-être pas tort.

Citron.

Il y a des vieilles femmes chez lesquelles le désir ne vieillit point, et qui donneraient beaucoup pour un jeune homme comme vous. Prenez garde !

Don Juan.

Tu as raison.

Citron.

Il y en avait une naguère qui me lorgnait. Elle n’avait plus de sourcils, et elle les teignait de la couleur de son vêtement. S’il était bleu, ses sourcils étaient d’un bleu superbe ; si de nacre, ils devenaient nacrés ; si vert, je les voyais aussitôt verdir.

Don Juan.

Tais-toi, tu me fais horreur.

Citron.

Je vous dis la vérité.

Don Juan.

Est-ce que tu as eu quelque liaison avec elle ?

Citron.

Que voulez-vous… elle me donnait de l’argent mignon. — Et je conclus de là que vous serez pris tôt ou tard par des sourcils verts.

Don Juan.

Au nom du ciel ! ne me présente pas une pareille image.

Citron.

Pourquoi cela ?

Don Juan.

J’admets bien des yeux verts… mais les sourcils !

Citron.

Eh bien ! laissons cela. — Dites-moi, qu’allez-vous faire pour sortir d’ici ? car ça ne m’amuserait guère pour ma part de vivre ainsi coffré.

Don Juan.

J’aurai une protection.

Citron.

Laquelle ?

Don Juan.

Le généreux don Louis de Ribera, fils du corrégidor, lequel est quelque peu parent du duc d’Alcala. Il me suffira de l’assurer de mon innocence pour qu’il me tire de prison. Un peu de protection