Page:Lorrain, Jean - Sonyeuse, 1891.djvu/286

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ment dans une vague maison de santé, devenu à moitié fou après avoir mangé toute sa fortune et jusqu’à la dot de sa femme ; cette petite femme-là a jadis révolutionne toute l’aristocratie de Marseille, ça été une élégante, une lionne de grande ville de province : sa situation perdue, elle s’est mise courageusement à la besogne, elle avait un talent d’amateur ; aujourd’hui c’est presque un peintre. Quel âge donnes-tu donc à Mme Arnheim ?

— Trente-deux à trente-cinq ans.

— Elle a quarante-trois ans, mon cher, et elle est mère de trois enfants, deux filles entrées à Saint-Denis, Dieu sait comment, et un fils au Borda, un fils de dix-huit ans qui se destine a la marine. Elle entretient de son travail toute la maisonnée, mari et enfants, trouve le moyen entre ses leçons et ses séances d’aller dans le monde, de se montrer à l’Opéra en première loge d’amis, et de diner en cabinet particulier. D’ailleurs l’homme qui l’accompagne n’attend que la mort du mari pour l’épouser.

— Mais alors, c’est presque honnête.

— Presque honnête est le mot. Malheureuse-