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Page:Loti, Matelot (illustration de Myrbach), 1893.djvu/234

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s’apercevait que non, que sa main était restée lourde et immobile, pendante hors de son drap, et qu’aucune feuille commencée n’était là sur sa couverture. Alors il s’agitait désespérément, demandait par grâce de quoi écrire.

Comme aux petits, on lui répondait : — « Tout à l’heure, oui, dans un moment, quand la fièvre sera un peu tombée, on va vous donner votre encrier et votre « boîte ».

Et les infirmiers échangeaient un bon regard ; ce qu’ils ne lui disaient pas, c’est que cette boîte, dans un plus violent coup de tangage, avait roulé à terre, ouverte, brisée, en même temps qu’une lame s’engouffrait à bord, inondant tout ; — et que les chères petites choses, trempées d’eau salée et de boue fétide, n’étaient plus à présent qu’un amas lamentable : lettres, portraits, — ou pauvres cahiers de collège entre les pages desquels gisaient, ensevelis à jamais, ses espoirs d’admission au Borda.

Pauvre enfant, fait pour la vie insouciante et jeune, pour l’amour et le rêve,