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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/110

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ter, car elle est un des plus vieux sanctuaires chrétiens d’Occident, et les Italiens, même ceux du peuple, attachent une haute importance à l’avoir recouvrée. Sous ardent soleil de ce matin d’août, elle est la silencieuse, l’air délaissé, entourée à peine d’un hameau de quelques foyers. Dès l’abord son archaïsme se révèle et le respect s’impose. Le seuil franchi, on est surpris de voir que sa nef est immense : c’est qu’elle fut jadis la cathédrale d’une ville de cinq cent mille habitants, dont rien ne reste plus. On sait qu’au début de l’ère chrétienne des tourmentes de toute sorte bouleversèrent cette région de la Vénétie actuelle, où bouillonnait une vie intense, où toute une population aventureuse, en avance de quelques siècles sur le reste du monde, était seule à connaître les lointaines contrées de l’Afrique et de l’Asie, et en rapportait des richesses qui la mettaient en butte aux continuelles agressions des hommes plus barbares de l’Est.

La merveille du lieu est le pavage de la vaste nef, la plus grande mosaïque romaine venue jusqu’à nos jours. En tons couleur de chair, les portraits de tous les fondateurs sont