Aller au contenu

Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

son parcours, elle a englouti une centaine de soldats, que l’on n’a pu retrouver qu’à la fonte des neiges, et qui dorment à présent, sous ces petites croix, au milieu d’un grand désordre d’arbres chavirés et de pierres bouleversées. (Dans les Dolomites, les Italiens, en plus de tant d’autres dangers, ont aussi à compter avec le caprice des avalanches.)

Çà et là on voit passer en l’air des espèces de tout petits chariots qui courent sur de minces câbles d’acier ; ils traversent d’effroyables abîmes, pour aller comme à vol d’oiseau d’une cime à une autre, et on dirait, de loin, des perles noires enfilées, qui glisseraient sur leur fil. Ce sont les « téléfériques », un mot qui ne peut se rendre en français que par une périphrase. Les Italiens, dans une pareille région, ont été obligés de développer à outrance ces frêles communications aériennes, et on se représente quelles difficultés pour les établir ! Des compagnies de cent, cent cinquante hommes grimpeurs, portant à la file sur leurs épaules des centaines de mètres de câble d’acier, ont mis des heures, des jours, à faire d’impossibles ascensions dans les Dolomites, s’accrochant avec leurs