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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/228

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Nous projetons même d’ouvrir un rayon de poules et de lapins !

Et c’était si amusant, en même temps que si beau, de les entendre, dans cette maisonnette, parler ainsi, ces reines de la richesse et du luxe, dont l’une était la fille d’un célèbre milliardaire ! Depuis six mois déjà elles habitaient ici, confinées au milieu de ces désolations et ardemment occupées à faire les Petites-Sœurs-des-Pauvres, elles qui auraient pu vivre dans le faste et s’offrir les plus sardanapalesques fantaisies ; non seulement elles donnaient l’or à pleines mains, mais, ce qui est mille fois plus noble et plus rare, elles donnaient leur temps, leur intelligence et leur cœur sans compter.

Elles avaient dans la voix quelque chose d’un peu décidé, de brusque et d’autoritaire qui n’était pas de chez nous, mais que tempéraient toujours des inflexions de bonté compatissante dès qu’il s’agissait des pauvres et des humbles. Je vis tout de suite les étonnements que les paysans et paysannes de nos vieilles provinces de France leur causaient, à elles, habituées aux conceptions larges et ultra-modernes ; la maladresse et la presque