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Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/60

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voulu faire trêve à ses anxiétés, à ses terreurs, et souhaiterait s’amuser un peu sous le ciel du printemps. De frontière, il n’y en a plus ; depuis que l’intimité s’est faite entre nos deux pays, on passe, sans s’en apercevoir, de l’un à l’autre ; si l’on ne voyait çà et là, sur les auberges, des enseignes en langue flamande, on se croirait encore en France.

Après trois quarts d’heure d’auto, j’arrive au village où les souverains se sont réfugiés, sur un dernier lambeau de leur Belgique saccagée, et voici les villas royales sur les dunes, tout au bord de cette mer qui sommeille.

Dans le salon modeste où l’on me fait entrer d’abord, j’entends venir d’une pièce voisine le plus imprévu et le plus drôle de tous les tapages ; on dirait la récréation d’une école très nombreuse, des rires et des cris d’enfants, des sauts, des chansons ; je crois même que l’on danse des rondes, sur un vieil air flamand chanté en chœur par une quantité de petites voix cocasses.

Très modeste aussi, le salon où S. M. le roi Albert me reçoit, avec sa cordiale bienveillance et sa parfaite bonne grâce. Quand je