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Page:Loti - La troisième jeunesse de Madame Prune, 1905.djvu/96

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souhait, il n’y a eu nulle équivoque, et, sur la dernière marche du vieil escalier, mademoiselle Pluie-d’Avril, prosternée, son éventail à la main, me suit d’un franc et gentil sourire…

Mais qu’est-ce qu’il peut bien y avoir, dans cette toute petite tête de danseuse, et dans ce petit cœur ?… Toujours la mélancolique interrogation sans réponse, que j’ai si souvent ressassée à propos d’êtres essentiellement différents de moi et indéchiffrables, chats, singes, ou enfants des races humaines très distantes de la nôtre, dont le regard était entré dans le mien par la route profonde… Et puis, quels seront ses lendemains, à celle-là, et quelles prostitutions l’attendent ? Restera-t-elle seulement jolie en grandissant, quand la fleur de l’enfance sera fanée sur ses joues ? Et alors, si elle ne l’est plus, jolie, dans quelle misère ira-t-elle finir, la petite fille aux belles robes ?

Tout en songeant à ces lendemains de mademoiselle Pluie-d’Avril, qui incarne encore un rêve du vieux Japon, du Japon des laques et des éventails, je retombe peu à peu dans le Nagasaki moderne, et voici les quais, les ca-