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Page:Loti - Le Mariage de Loti, 1880.djvu/252

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tristesse ont été créées pour d’autres imaginations que les nôtres.

Derrière nous, les grands pics s’élançaient dans le ciel clair et profond. Dans toute l’étendue de cette baie, déployée en cercle immense, les cocotiers s’agitaient sur leurs grandes tiges ; la puissante lumière tropicale étincelait partout. — Le vent du large soufflait avec violence, les feuilles mortes voltigeaient en tourbillons ; la mer et le corail faisaient grand bruit……


J’examinai ces gens qui m’entouraient ; ils me semblaient différents de ceux de Tahiti ; leurs figures graves avaient une expression plus sauvage.

L’esprit s’endort avec l’habitude des voyages ; on se fait à tout, — aux sites exotiques les plus singuliers, comme aux visages les plus extraordinaires. À certaines heures pourtant, quand l’esprit s’éveille et se retrouve lui-même, on est frappé tout à coup de l’étrangeté de ce qui vous entoure.

Je regardais ces indigènes comme des inconnus, — pénétré pour la première fois des différences radicales de nos races, de nos idées et de