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Page:Loti - Le Mariage de Loti, 1880.djvu/314

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le silence et l’obscurité, un rêve sombre s’appesantit sur moi, une vision sinistre qui ne venait ni de la veille ni du sommeil, — un de ces fantômes qui replient leurs ailes de chauves-souris au chevet des malades, ou viennent s’asseoir sur les poitrines haletantes des criminels.....

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NATUAEA

(Vision confuse de la nuit)


… Là-bas, en dessous, bien loin de l’Europe, le grand morne de Bora-Bora dressait sa silhouette effrayante, dans le ciel gris et crépusculaire des rêves…

… J’arrivais, porté par un navire noir, qui glissait sans bruit sur la mer inerte, qu’aucun vent ne poussait et qui marchait toujours… Tout près, tout près de la terre, sous des masses noires qui semblaient de grands arbres, le navire toucha la plage de corail et s’arrêta… Il faisait nuit, et je restai là immobile, attendant le jour, — les yeux fixés sur la terre, avec une indéfinissable horreur.