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Page:Loti - Le désert, 1896.djvu/226

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Cependant, par degrés, à mesure que le soleil, en montant, chauffe le désert, les horizons deviennent moins précis ; — puis, tout à fait vagues, et les espèces de mousselines blanches, de gazes moirées qui précèdent les mirages commencent à trembloter de plusieurs côtés à la fois.

Et il y a là-bas un troupeau de grandes bêtes blanches à long cou — des chameaux blancs ! — mais en quantité prodigieuse. Ils marchent avec lenteur, dans la lumière à la fois éblouissante et trouble ; ils semblent paître… Tout de même, nous nous défions de nos yeux, sachant que les proportions n’existent pas dans le désert, aux heures de ses fantasmagories…

Ah ! un des chameaux déploie de grandes ailes et s’envole, — puis deux, puis trois, — puis tous… Des cigognes ! Ce n’était qu’un peuple innombrable de cigognes, qui prend la volée à notre approche ; elles se lèvent en masse, il en arrive du fond des lointains, que nous n’apercevions pas ; elles tourbillonnent, le ciel en est obscurci, et nous reconnaissons le nuage d’hier au soir.

Toutes les cigognes d’Europe sans doute, qui rentrent dans leurs foyers avec le printemps.