Aller au contenu

Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 4.djvu/173

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

aucun intérêt, ni pour moi qui ne sais pas le latin, ni pour toi qui veux l’oublier ? Penses-tu éblouir Faustine de ton érudition étrangère ? Pauvre ami, ce n’est pas moi que tu tromperas par des paroles. J’ai déshabillé ta grande âme hier soir sous mes couvertures et je sais quel est le pois chiche, Timon, dont elle se soucie.

— Crois-tu ? » dit simplement le jeune homme.

Mais Phrasilas commença un deuxième petit couplet d’une voix ironique et doucereuse.

« Séso, quand nous aurons le plaisir de t’entendre juger Timon, soit pour l’applaudir comme il le mérite, soit pour le blâmer, ce que nous ne saurions, rappelle-toi que c’est un invisible dont l’âme est particulière. Elle n’existe pas par elle-même, ou du moins on ne peut la connaître, mais elle reflète celles qui s’y mirent, et change d’aspect quand elle change de place. Cette nuit, elle était toute semblable à toi : je ne m’étonne pas qu’elle t’ait plu. À l’instant, elle a pris l’image de Philodème ; c’est pourquoi tu viens de dire qu’elle se démentait. Or, elle n’a soin de se démentir puisqu’elle ne s’affirme point. Tu vois qu’il faut se garder, ma chère, des jugements à l’étourdie. »

Timon lança un regard irrité dans la direction de Phrasilas ; mais il réserva sa réponse.

« Quoi qu’il en soit, reprit Séso, nous sommes ici quatre courtisanes et nous entendons diriger la conversation, afin de ne pas ressembler à des