Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 7.djvu/93

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mer des Indes au bassin de la Loire, et campèrent à peu près sur leurs positions. Ce sont les vieux Sarrasins ! Allez les voir : ils sont superbes !

Cependant, le navire s’était arrêté sur ses ancres, dans une rade aux lignes harmonieuses : le village de Nemours s’allongeait devant la Méditerranée, Nemours, le seul point de la terre marocaine où flotte le drapeau français, le seul vallon que le maréchal Bugeaud sut obtenir du sultan, après la victoire de l’Isly.

Nous descendîmes dans un canot qui devait nous conduire à terre. Le Marocain mécontent, que j’avais entrevu sur le pont, nous suivit et prit place sur le banc du milieu.

Je le considérai : il avait laissé tomber le capuchon blanc de son burnous, et sa fine tête se dressait, portée par un cou admirable. Les traits de son visage étaient composés de tous ceux que nous estimons nécessaires à la noblesse d’une expression. Une majesté consciente flottait dans son sourcil et jetait son ombre à l’œil noir. Ses lèvres minces et ses narines attestaient sa race absolument pure.

Walter H… le fit parler. Il s’appelait El Hadj Omar ben Ab-del-Nebi, caïd de Sidi-Mallouk.

Plusieurs fois déjà, au retour de Tanger, il avait gagné sa tribu par l’escale de Melilla, les sentiers du Riff et les bords de la rivière ; mais, détourné de sa route habituelle, il s’inquiétait du