Aller au contenu

Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 8.djvu/128

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Psyché allait répondre. Une pudeur la retint. D’ailleurs, que savait-elle ? Si peu. Aimery ? Tant. Elle hésita, puis s’intimida parce qu’elle se taisait et, se sentant rougir, elle inclina la tête.

« N’en doutez pas, dit Aimery. Quand deux amants ont uni leurs lèvres, l’amour leur a donné, non ce qu’il a de plus pur, car tout est pur autour de lui, mais ce qu’il a d’inexprimable et ce qu’il nous laisse d’éternel.

— L’éternel souvenir ; non l’éternel remords.

— Vous l’imaginez avec éloignement comme une victoire des sensualités, une fête de la matière humaine…

— Je ne l’imagine pas ! Je ne le connais pas !

— … quand il est au contraire l’évocation sublime de l’être immatériel se révèle en nous ! »

Aimery saisit la jeune femme dans ses bras, et chercha sa bouche entr’ouverte.

« Avez-vous écrit, vous aussi, sur votre album intime, ce vieux : vers que toutes les jeunes filles ont copié au moins une fois : « Aimer, c’est être deux et ne se sentir qu’un » ? On leur fait croire que c’est une définition de l’amitié ; mais celles-là seules qui connaissent déjà le lit d’amour et toutes ses chaleurs, comprennent que c’est le secret de l’extase amoureuse. Quand je touche vos lèvres, Psyché, vous êtes moi. Je respire par votre poitrine, je pense par votre cerveau, je frissonne par vos nerfs, j’éprouve par vos sens. Dans ma