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Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 8.djvu/181

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Aracœli. Comme jadis Héraclès, Aimery Jouvelle n’hésite nullement dans son choix. Mais en fin de compte son choix se retournera contre lui, comme il advint au fils d’Alcmène, — parce que tout rêve réalisé déçoit le rêveur, et parce que la vie toujours se venge de ceux qui ont osé lui préférer un idéal.

Une telle œuvre, quand l’auteur y conte sa propre histoire, et non pas tant ni seulement son histoire authentique, mais son histoire imaginée, extrapolée ; l’histoire, non de ses faits, mais de ses espoirs, et des gestes qu’il aurait voulu accomplir ; une telle œuvre a de quoi faire peur à qui la fit.

Un autre scrupule retint peut-être encore Pierre Louÿs.

Il avait, toute sa vie, chanté l’amour, — de l’Astarté jusqu’à l’Archipel ; — mais l’amour exclusivement sensuel qu’avaient avant lui chanté ses grands inspirateurs, les maîtres d’Athènes, ceux d’Alexandrie, ceux de Syracuse. Le jour qu’il inventa Psyché, un amour différent, jusqu’alors inconnu ou dédaigné, s’était révélé à lui : l’amour plus complexe des êtres plus évolués, l’amour total qui ambitionne mieux que les simples voluptés de la chair, l’amour qui tend à joindre et à mêler non seulement les corps mais les esprits, et les cœurs, et les intelligences. C’est à cette passion plus moderne que Pierre Louÿs, brûlant ses anciens dieux, avait résolu de consacrer son suprême effort. Opposer l’un à l’autre ces deux symboles, —