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Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 9.djvu/297

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le voir à sa Revue (27 juin), j’ai aperçu là Tola Dorian, mais il m’a fait monter au premier, dans une salle qui ressemble à une chambre de bonne, où on dépose les revues non vendues, et dont les murs sont tapissée d’affiches et de programmes électoraux : Rodolphe Darzens, candidat socialiste, quartier Saint-Georges. C’était le jour où paraissait son article sur le Journal libre, projet de fédération des revues littéraires ; nous en avons longuement parlé, avec Feenik, auteur du projet. Au cours de la conversation, il m’a demandé des vers, pour sa Revue.

« Vous ne savez pas ce que vous demandez. Vous ne pourrez peut-être pas les insérer.

— Pourquoi ? parce qu’ils sont trop immondes ?

— Oh ! ce n’est pas cela ; mais je ne sais pas ce qu’ils valent. Ne vous engagez à rien.

— Je m’engage à vous les « rétorquer » s’ils ne valent rien. »

Avant-hier seulement, trois semaines après par conséquent, je me suis décidé à lui porter mon « Effloraison ». C’était un jeudi, jour de correction des épreuves, et je sentais que je le dérangeais, sans oser rien lui montrer. Enfin, j’ai tiré mes ennéades,

« Comment, vous en aviez sur vous et vous ne les montriez pas ? »

Il les a lus, et très mal lus, avec une fausse mélopée mal rythmée, qui les brisait. Chaque vers s’en allait, lambeau par lambeau. Quand il