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Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 9.djvu/333

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la stimuler, il lui faut un plaisir certain, l’annonce formelle d’un bonheur promis ; c’est pourquoi la volupté d’écrire est seule capable de la remuer jusqu’au fond.

Et encore, est-ce penser ?

Souvent il se produit ce phénomène étrange. Comme j’ignore entièrement avant d’écrire ce que mon cerveau a dessein d’exprimer, il arrive que je suis parfois arrêté, sans que je puisse reprendre la direction de ma pensée, ayant abdiqué avant d’écrire ; mais mon cerveau travaille à mon insu, par cela seul que je l’ai mis en mouvement, et c’est par une sorte de soulagement vague que j’apprends la découverte de la phrase cherchée. Je commence alors, les yeux fermés, et ce n’est qu’en relisant que je la connais.


17 septembre.

Darzens habite près du canal Saint-Martin un appartement très modeste, rue de Beaurepaire, 33. Il vit la avec sa mère. Sa maîtresse habite à deux pas, rue de Marseille, n° 13.

J’ai été le voir aujourd’hui pour la première fois. Il a été comme toujours très aimable, et néanmoins, je garde encore ma réserve ; quand on a été trompé une fois, on se défie de tout le monde. Il m’a demandé pour le Théâtre-Libre une pièce coûte que coûte. Il paraît qu’ils manquent de vers.