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Page:Louÿs - Trois filles de leur mère, 1979.djvu/199

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sur moi maintenant, ma salope ! compte sur moi pour friser les poils de ta connasse ou pour te passer le bâton de rouge sur le trou du cul ! Je ne veux plus de ta langue ni de tes sales tétons pour me torcher ! et je te chie ! je te chie, maman ! »

Ce dernier mot, ce « maman » me fit tressaillir. Mauricette faillit venir à moi, mais voyant l’ahurissement avec lequel je l’écoutais, elle tourna court et se jeta sur un lit, la tête dans l’oreiller.

Durant toute cette terrible scène je n’avais regardé que Mauricette. Quand je levai les yeux et les mains vers Teresa pour l’empêcher de tuer sa fille comme je pensais qu’elle allait le faire, je la vis aussi tranquille que si elle avait dirigé une répétition de théâtre. Elle frappait sa paume du bout des doigts pour simuler sans bruit un petit bravo et elle dit tout bas avec un long sourire, étonnée de ma pâleur :

« Est-ce que tu ne comprends pas ce qu’elle veut ? »

Où avais-je l’esprit, en effet ? Je n’y pensais pas. Mais la phrase était claire, je répondis précipitamment.

« Non ! oh ! non ! jamais devant moi !

— Bien. Va-t’en. Laisse-moi seule avec elle.

— Pas ce soir, je t’en prie. Pas ce soir. »

Teresa poussa un soupir et, avec une patience qui ne lui était pas coutumière, elle dit entre ses lèvres :

« Ah ! les amoureux !… Eh bien ! reste, toi. Mais tu seras sage ! C’est promis ? »