Aller au contenu

Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/113

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


L’ASSASSINAT DE LA VOUIVRE


Le vieux Jean-Claude avait eu son enfance bercée au récit des légendes de la Vouivre, en qui il croyait de toutes les forces de son âme.

Sa grand’mère lui avait affirmé, devant le poêle ronronnant et le chat mystérieux, quand sifflait la bise et tourbillonnait la neige, l’avoir vue de ses propres yeux, les soirs de clair de lune et les nuits d’étoiles, promener par les prés humides de la Moraie sa sveltesse robuste de serpent ailé. Dans les miroirs des flaques encadrées de prèles scintillaient les feux de son escarboucle de diamant qu’elle déposait à son côté avant de se pencher sur la nacre cristalline des ruisseaux pour s’y désaltérer selon le rite. Et la foi, bue avec les paroles de l’aïeule morte, s’était implantée si profondément en lui que toutes les railleries et les hochements incrédules des fortes têtes n’en avaient jamais eu raison.

Ah ! pouvoir lui ravir l’escarboucle, l’escarboucle qui eût assuré la fortune et la puissance au héros de cette fabuleuse aventure ! Nul audacieux