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Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/117

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À quarante pas de l’endroit où il avait vu la bête, dix minutes auparavant, Jean-Claude serra le bras de Narcisse, murmurant d’une voix basse comme le souffle d’un mourant :

— La vois-tu ?… Là-bas, derrière !

Narcisse pencha la tête en avant, les sourcils froncés, les yeux fixes, sa longue barbe noire, raide et comme figée.

C’était vrai ! Là-bas quelque chose brillait intensément et cette clarté mystérieuse ne pouvait provenir d’une source naturelle de lumière.

Vers la gauche, une branche craqua : les autres étaient proches.

— Attention ! Elle va se sauver ! Vois, ça remue, bredouilla Jean-Claude,

Le profil de bouc de Narcisse s’inclina sur le canon du lefaucheux à deux coups chargé de chevrotines.

Une détonation formidable fit tressauter la nuit et il y eut comme un bond désespéré à côté de l’escarboucle, qui sembla pâlir un peu.

Au même moment, une rafale de coups de feu ravagea le silence : les autres tiraient aussi.

— En avant ! rugit Narcisse, qui avait remplacé sa cartouche vide.

— En avant ! rugirent les autres, en formidable écho.

Malgré l’enthousiasme de leurs cris, pas un n’apparut, et Narcisse avança seul, très prudem-