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Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/179

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DEUX VEINARDS


Ce n’était point sans raisons, ni même pour de mauvais prétextes que les gamins de Longeverne tenaient en suspicion les deux Grangers, ainsi surnommés parce qu’ils habitaient, à quelque cinq cents mètres du village, une belle et vaste maison de ferme, fort bien installée et que l’on appelait, selon la coutume du pays comtois, la Grange.

Les deux Grangers ne portaient point de blouses comme les autres gosses ; ils étaient, en toute saison, chaussés, non de brodequins à gros clous, mais de souliers à bouts pointus, ce qui faisait dire à Camus qu’ils mettaient tous les jours leurs « croquenots » du dimanche ; ils avaient des casquettes à visière de cuir et à galon d’or, comme les collégiens ou les « séminards », et suivaient la mode en arborant des pantalons courts avec, en été, des chaussettes laissant à nu leurs mollets, ce qui ne se faisait pas à la campagne.

Mais ce n’était point précisément pour cela qu’on les avait à l’œil : pas plus au village qu’en