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Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/264

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se souleva qu’avec peine pour retomber bientôt lourdement sur sa couche.

— Miséricorde ! se lamenta la vieille. Il ne nous manquait plus que ça ! Ah, je savais bien qu’un malheur n’arrive jamais seul ; qu’est-ce qui nous pend encore à l’oreille ? Ma fille enceinte, mon ménage en morceaux et un cochon d’homme qui se cuite au lieu de faire marcher comme il devrait le dégoûtant qui a mis Joséphine dans l’état où elle se trouve au jour d’aujourd’hui.

Cependant, le Carcan attablé, buvait avec fureur tandis qu’à la maison les douleurs de Joséphine persistaient, augmentaient, prenaient une tournure particulière.

Deux heures après, une voisine dépêchée par sa femme vint adresser au Carcan une communication qui était, paraît-il, d’une extrême urgence :

— Ta femme m’a dit de venir te dire…

— Ta gueule ! Ma femme, je l’emm… et toi aussi ! Fous-moi le camp, je ne veux pas entendre parler d’elle ni de toi !

Et ce fut par cette invariable réponse qu’il accueillit toutes les parlementaires juponnées que, patiente et persévérante, sa femme persistait à lui dépêcher d’heure en heure sous des prétextes, semblait-il, de plus en plus urgents.

À la nuit noire, quand l’aubergiste ferma ses portes, il rentra, chancelant sur ses longues quilles et tellement ivre qu’il ne remarqua même