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Page:Louis Pergaud - Les Rustiques nouvelles villageoises, 1921.djvu/27

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LE RETOUR


Il y avait trois jours que Le Mousse, flanqué de Finaud, était parti, le fusil à l’épaule, pour la foire de Rocfontaine.

Le chien, qui faisait vieux et n’aimait point à découcher, était, comme d’habitude, rentré dès le premier soir et gardait le coin du feu, car on était en hiver.

La Moussotte n’avait pas été le moins du monde émue de l’absence prolongée de « son homme » ; il y avait beau temps qu’elle était habituée à ces bordées si régulières qu’elles en étaient presque devenues réglementaires, et comme c’était une paysanne au cœur fruste, dépourvue de toute sentimentalité, sinon de sentiment, elle attendait, avec la confiance des simples, mêlée à je ne sais quelle sorte de joie perverse, le soir de ce troisième jour pour accueillir le retour présumé de son époux de la rafale de reproches et du torrent d’injures par lesquels elle soulageait son cœur de ménagère et se vengeait un peu, elle et son sexe, de la tenue ou de la retenue, injuste à son sens, que son costume de femme l’obligeait à garder.