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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/150

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LA FIN DE RABEVEL

de l’assouvir quoi qu’il lui en coutât. Rien qui dérivât désormais son action. Il commença de poursuivre la malheureuse de toutes les manières ; chez elle où elle devait subir les assauts d’une violence désordonnée d’où ils sortaient haineux, invaincus, et brisés ; chez lui où il se livrait à toutes sortes de jeux dangereux, feignant l’amant comblé mais indiscret, ayant des attitudes et des gestes qui, surpris par Reine, n’eûssent laissé nul doute sur leurs relations et dont elle restait plus morte que vive, paralysée, n’osant parler, n’osant lever les yeux. Un jour, chez elle où, à cause des domestiques, elle ne pouvait ni le recevoir à chaque fois ni lui condamner définitivement sa porte, elle lui fit des reproches véhéments.

— Toujours ce sera ainsi, dit-il ; et puis un beau jour une lettre anonyme fera entrer ma femme qui nous trouvera ensemble à demi-dévêtus ; et, un autre jour, monsieur votre fils partira pour l’Océan Pacifique ; et un autre jour…

— Brute ! dit-elle courroucée… La qualité de son sang se révéla d’un geste. Elle le gifla avec une force étonnante pour une femme. Lui, d’un coup de poing, l’envoya rouler dans une bergère. Elle se releva avec le courage d’un boxeur, fonça sur lui, le saisit au cou à deux mains et le mordit sauvagement aux doigts. Au bout d’un moment épuisés, ils se relâchérent avec méfiance. Mais il leur semblait que, dans le sursaut et l’apparence de la haine, leurs corps venaient de se reprendre.

La mort de Bordes survenue à cette époque eut pour