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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/231

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LA FIN DE RABEVEL

les parties les plus subtiles et les plus vagabondes de nos âmes ? Les faits les plus fréquents l’indiquent. Un malaise nous fait deviner le regard qui nous suit. Les sentiments puissants, la haine, l’amour à la veille de se traduire en actes dégagent des effluves. Les intentions de rapt ou d’homicide se traduisent même dans le silence. Plus d’une victime mue par l’aspiration secrète a saisi au vol en se retournant le poignet armé de la lame au moment où il allait s’abattre.

— C’est vrai, dit Olivier, j’ai déjà eu souvent l’occasion de le constater.

« Ainsi, depuis quelques jours une chose amère me pénètre. Elle s’inocule en moi par je ne sais quel sens. Le goût ni l’odorat n’en sont impressionnés et pourtant j’éprouve l’odeur et la saveur. Chose astringente, énervante, pénible ; une attention bizarre et douloureuse, une attente qui redoute un événement mais s’exaspère qu’il s’attarde. Et quel événement ! Mais je ne sais. Je flaire quelque chose d’horrible, la catastrophe, le sang près de moi peut-être. Et comme je le dis à Marc, il sourit : « Dieu merci, les pressentiments ne se réalisent pas toujours. Les tiens t’annoncent une dilatation d’estomac plutôt qu’un crime, c’est moins dangereux ».

Mais, Rabevel, tout de même surpris, le traita de pessimiste. « Tu deviens neurasthénique, dit-il. Viens avec moi au billard, »

Ils descendirent. Rabevel ayant fait servir des citron-