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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome III (1923, NRF).djvu/234

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LE MAL DES ARDENTS

pathétique qui roule à pleines volutes et m’enveloppe. On la sent alors. L’arme sous le nez de cette femme qui vibre avec moi et — comprends-tu ? — comme moi, oui, comme moi, — Allons nous nous tuer ? Oui, sans doute. Non, peut-être. Un mot, un signe. Ce serait si merveilleux. Mais attendre. Recommencer encore. Elle va décider. Elle décide. Mot hypocrite : « Je veux bien te pardonner ». Elle sait que ce mot nous promet l’heureux recommencement, l’inextinguible jouissance. Une scène semblable avec des variantes nous reconquerra haletants, haletants. Il faut y croire. Allons ! et je l’embrasse. Elle m’injurie, m’accable de reproches, des mots canailles et hideux que nous aimons. Ce n’est pas artificiel mais nous en avons conscience. Nous connaissons l’avenir mais nous aimons le vivre et il ne trahit pas notre liberté. Je sais que mon pardon impose une rançon : les bijoux, la soumission, l’air de bête domptée mais en échange les voluptés apaisantes. Voilà mon bonheur qui s’attendrit et vive l’existence ! Balbine alors est l’ange le plus adorable.

— Eh ! là, arrêtons au bord du roman feuilleton.

— Arrêtons…

— Nous en sommes donc pour l’instant à la période roucoulante ?

— À la période roucoulante.

— Et jusqu’à quand ?

— Le sais-je ? Ça va. Je me sens plein de force et de béatitude. Tout vibre en moi. Le ciel et l’eau. L’amour,