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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome II (1923, NRF).djvu/122

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LE MAL DES ARDENTS

criait-il. Ah ! on ne m’attendait pas et on faisait la bombe hein ! la vieille garce ? On amène son amant chez moi maintenant ? Qu’il fasse voir sa gueule celui-là ?

Il alla à la fenêtre, tira les rideaux et poussa un cri de colère :

— Rabevel ! Nom de Dieu ! Bernard Rabevel ! Bernard s’était dressé aussitôt, toute sa colère et sa résolution ressuscitées ; il devinait que Mulot arrivait de Clermont, venait d’achever ces négociations qui devaient le perdre, le ruiner ; il tressaillit de joie à l’idée de la confusion que faisait cet homme : « Le résultat sans le sacrifice : il est cocu par moi sans l’être ! » Réflexions qui durèrent l’instant d’un éclair. Il ne dit mot, serra les dents : « Qu’il bouge, qu’il me donne un prétexte, pensait-il avec une impatience folle du meurtre, je le fous par la fenêtre ». Mais Mulot était tombé sur un fauteuil, touchait sa gorge, sa poitrine. « Il est emphysémateux ou cardiaque, ce paquet, se dit Bernard avec regret, ça va le sauver ». L’autre déboutonnait son col fébrilement : « Bernard Rabevel, Bernard Rabevel, ah ! nom de Dieu » et il roulait des yeux désorbités. Ce fut au moment où il répétait le nom du jeune homme que la Farnésina qui avait paru anéantie, se leva brusquement et, comme folle s’écria : « Idiot, idiot, c’est notre fils, notre fils, tu entends ? Oui, notre fils ! » prenant Bernard par le cou, elle le couvrait de pleurs et de baisers. Soudain, elle s’arrêta, ils se regardèrent fixement, mesurèrent l’horreur du trou où ils avaient failli