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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome II (1923, NRF).djvu/130

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LE MAL DES ARDENTS

— Et moi, on ne m’embrasse pas ? dit Mulot qui rentrait, Ah ! mon petit Bernard, qui aurait cru cela ? il y a encore des miracles.

Il posa sa serviette bourrée de papiers sur un fauteuil.

— Tout ça, dit-il, va d’ailleurs transformer la situation. Nous qui te cherchions noise dans le Puy-de-Dôme, nous abandonnons la dispute. J’en ai parlé à Blinkine, il est d’accord là-dessus. Voilà, je prends mon fils avec moi, je l’introduis comme directeur général dans l’affaire avec 10 % sur les bénéfices. Après, nous verrons. Tu t’installeras à mon bureau de la rue Mogador et tu te mettras au courant de mes affaires ; je vais lâcher les voyages, tu les feras pour moi et aussi bien que moi et je pourrai me reposer un peu et me consacrer à ta mère, pas vrai, cocotte ? Je t’abandonnerai pour ça quinze fafiots de mille par an. Te voilà content, hein ? Ai-je bien arrangé tout ça… ? E t puis, j’oubliais, je t’adopte, tu deviens Rabevel-Mulot de la Kardouilière. On va te préparer une chambre ici, tu vivras avec nous ; on te retiendra la pension comme de juste sur tes appointements, j’arrangerai cela aussi. Voilà l’affaire. Allons, c’est entendu. Et maintenant, au travail.

Bernard immobile et silencieux avait, pendant ce discours, senti se lever et peu à peu croître en lui la colère et le désappointement. C’était ça la famille ? Ce tutoiement, ce ton autoritaire, cette intention cynique de le tenir, de le conduire et de l’exploiter, l’avaient exaspéré. Il se contint et répéta simplement en prenant son chapeau :