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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome II (1923, NRF).djvu/177

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LE FINANCIER RABEVEL

Ségala, en plein Rouergue. Il consulta son indicateur :

— Nous ne sommes pas très loin de Saint-Circq-la-Popie, ne pût-il s’empêcher de dire.

Elle répondit tristement :

— Oui. Mais nous allons du côté opposé.

Leur vie présente n’était séparée, dans l’espace et le temps, de la vie qu’ils regrettaient que par quelques mois et quelques kilomètres qui suffisaient à définir une éternité. Comme autrefois, tous deux à la portière contemplaient le paysage ; le Quercy cédait au Rouergue ; la figure de la terre n’était plus la même mais les dispositions de leur cœur surtout avaient changé ; de leur cœur désormais contracté, désireux d’amour peut-être, mais résigné à l’apaisement. Les champs et les landes glissaient sous leurs yeux leur offrant des lignes nobles sans secousse comme sans mollesse ; à l’horizon les collines formaient un beau trait continu, frangé d’argent, une arabesque divine qui enlaçait leur esprit. Le passage entre les monts se faisait avec des inflexions si pures qu’ils y découvraient une sorte de tendresse comme celle d’un aveu. Bernard remarqua au flanc d’un mamelon un chemin blanc bordé de trembles suspendu en volutes parfaites au creux de ces ravins. Il le montra à Angèle.

— Quelle modeste agent voyer lui dit-il, a défini cette courbe idéale ? Le Nôtre l’eût aimé.

Il s’étonnait qu’on distinguât si peu de cultures.