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Page:Lucien Fabre - Rabevel ou le mal des ardents Tome II (1923, NRF).djvu/190

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LE MAL DES ARDENTS

existaient encore, larges, profonds et remplis d’eau ; forte bastide, peuplée de gens batailleurs ; leur jeunesse venait en nombre dans les foires chercher querelle aux coqs des autres endroits ; les Anglais n’avaient pu s’emparer de cette ville que par la ruse au temps où ils tenaient la Gascogne et tentaient d’annexer le Rouergue, Froissart raconte l’histoire dans ses chroniques. Au loin les flèches de Rodez vers le Nord et, vers le Sud, la tour rose de la cathédrale d’Albi. « Nous sommes comme les Templiers, dit Mauléon, nous dominons tout le pays ». Il réfléchit, hésita et finit par dire : « Moi, je ne suis pas un homme instruit, mais j’ai pensé bien souvent que, pour un homme intelligent qui viendrait habiter ici et se promener un peu tous les jours sur ces remparts, il y aurait de la consolation, je veux dire de la…  Mais je m’empêtre. Vous comprenez, ici, c’est comme si on regardait les étoiles au ciel ; ça élève l’esprit, n’est-ce pas ? »

Angèle était assise sur le parapet, le regard perdu. Au ras du sol, dans le lointain, des troupeaux blancs, des cabanes roulantes, la tache noire d’un labrit, la silhouette d’un berger. L’attitude contemplative de ces hommes frappait Bernard. Quelles pensées mystérieuses accourues des horizons immenses leur apportaient le goût et le désir de l’infini ?

— Sont-ils bergers de métier ou bien mènent-ils leurs propres troupeaux ? demanda-t-il.

— Bergers de métier en général. Certains d’entre eux