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Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/213

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LIVRE QUATRIÈME

Cette rapidité, tout l’affirme et l’atteste.
Expose une eau limpide à l’azur de la nuit :
La voûte constellée à l’instant même y luit.
Demande à ces flambeaux éblouissants du monde
Brusquement évoqués par le miroir de l’onde,
En quelle ombre de temps l’éclat de leurs grands corps
220Des rives de l’éther tombe aux terrestres bords !

Rends-toi ; cède, il le faut, à tant de témoignages.
Et comment pourrais-tu douter de ces images ?
Elles frappent tes yeux ; c’est tout ce que tu vois.
Ainsi monte l’odeur des herbes et des bois ;
L’eau souffle la fraîcheur et le soleil la flamme ;
Un ferment corrosif qui fume sur la lame
Sape le mur au bord des mers ; par tout le ciel
Volent des voix sans nombre ; une vapeur de sel,
Quand nous longeons les flots, nous arrive au visage ;
Tandis que l’âcre absinthe en infusant dégage
Une amère saveur dont le goût est frappé.
Ainsi, de toute chose à tout heure échappé,
Riche en formes sans nombre, un large flux s’élève,
Inépuisable flux sans obstacle et sans trêve :
Car toujours nous sentons, entendons et voyons,
Et rien ne rompt le cours de nos sensations.
La nuit, quand nous palpons un corps, sa forme est telle
Que la pleine lumière à nos yeux la révèle ;
La main la reconnaît. Le tact et le regard
240N’ont donc qu’un seul objet, un seul point de départ.
Si donc c’est un carré que notre main rencontre
Et constate de nuit, le jour qui nous le montre