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Page:Lucrèce - De la nature des choses (trad. Lefèvre).djvu/270

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DE LA NATURE DES CHOSES

Déluge suspendu sur cet humble univers !
Menace vaine aussi ! Les vents sont là, qui rasent
L’écume ; les rayons pompent l’onde et l’embrasent,
Espérant dessécher le monde, avant que l’eau
Sur la terre vaincue étende son niveau.
Tant l’immense combat dont le prix est le monde
Balance la victoire entre la flamme et l’onde !

Or, une fois déjà, la flamme a dominé ;
420L’onde une fois aussi sur les champs a régné.
Le feu, nous dit la Fable, a dévoré la terre,
Quand l’errante fureur des chevaux de son père
Emporta Phaéton à travers tous les cieux.
Mais un courroux poignant saisit le roi des dieux.
Arraché de son char, le héros magnanime
D’un soudain coup de foudre est lancé dans l’abîme ;
Il tombe. Le Soleil accourt, à peine à temps
Pour rattacher au char les coursiers haletants,
Et, reprenant au vol la lampe universelle,
Au monde rassuré verse une paix nouvelle.
Les vieux poètes grecs ainsi nous ont conté
Ces fables que dément la simple vérité.
Dès que, de l’infini sans mesure émanées,
S’amassent en un point des semences ignées,
Le feu peut triompher ; et si quelque élément
Contraire ne s’oppose à son débordement,
Tout s’évanouira dans la flamme implacable.
L’onde eut son heure aussi, rapporte une autre fable ;
Du fond de l’infini ses amas suscités
440Montaient victorieux par-dessus les cités,